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    Outrun, une légende de l’E-racing

    Certains jeux vidéo posent les jalons d’un genre et deviennent des légendes connues même des non-initiés. OutRun fait partie de cette caste et il est fort probable que vous l’ayez déjà aperçu, même si vous n’êtes pas forcément féru de jeux vidéos. Retour sur cette légende de la course automobile à gros pixels.

    Une Ferrari Testarossa rouge évidemment, une belle blonde sur le siège passager et des palmiers, tous identiques, qui défile à fond les grelots sur les côtés. Voici le portrait, rapidement brossé de OutRun, le jeu de course de voiture qui a rendu fou l’Archipel et dont, encore aujourd’hui, on peut trouver des bornes dans certaines salles d’arcade nippones.

    Un départ sur les chapeaux de roues ! On remarquera que sur cette version, le cheval cabré laisse sa place à un aigle et que les optiques arrière en longueur de la testarossa sont remplacées par des ronds. (Crédits : thefamouslastpull.com)

    Un véritable tour de force car OutRun est sorti en 1986, édité par Sega. Derrière le jeu, on trouve une légende, Yu Suzuki, déjà responsable d’autres hits des salles d’arcade : Hang-On et Space Harrier, tous deux sortis en 1985. C’est pour prendre la succession de ces deux légendes et continuer à faire transiter les pièces des poches des joueurs vers les caisses de l’entreprise que Sega commande OutRun.

    Le succès est immédiat et chaque salle d’arcade se doit de posséder une borne OutRun. Celle-ci sera déclinée en plusieurs versions dont la plus exclusive reprend la forme d’un véritable véhicule, avec les roues, le pot d’échappement, mais aussi le siège baquet, le levier de vitesses, les pédales et bien sûr le volant. Cette borne Deluxe embarque un large écran de 66 cm et elle bouge selon les mouvements de la voiture – dans la limite de l’époque bien entendu – et vibre lorsque le joueur a un accident.

    Les bornes OutRun. La version Deluxe est au milieu (Crédits : gametronik.com)

    Au total, les ventes de borne d’arcade OutRun atteignent 100 millions de dollars. Aux états-unis, il n’est pas rare que des bornes rapportent 1900 $ par semaine, à raison de 50 cents la partie. 50 cents et pas 25 (la norme pour une partie à l’époque) car OutRun est un jeu très sophistiqué pour l’époque qui demande des composants électroniques coûteux.   

    Pour bien comprendre cet engouement qui perdure jusqu’à aujourd’hui, il faut se replacer dans le contexte de l’époque. Les jeux de courses de voitures étaient souvent basés sur la compétition, dans un contexte donc assez cadré. Dans la peau du pilote, il fallait performer, battre ses concurrents et le chronomètre sur circuit.

    Dans OutRun, sans être un véritable bandit de la route, on participe tout de même a une course illégale, sur route ouverte. Car le jeu a été inspiré à Yu Suzuki, son créateur, par le film The Cannonball Run de 1981 avec Burt Reynolds notamment mais aussi Roger Moore, Farah Fawcett (une des drôles de dames), Dean Martin et sammy Davis Jr., excusez du peu.

    Ce n’est tout de même pas le film du siècle (Crédits : delessencedansmesveines.com)

    Cette comédie a elle-même été inspirée par la fameuse course illégale  et sans règles du même nom qui traversait, dans les années 70, les états-unis d’est en ouest. Les concurrents de la Cannonball étaient tout à fait libres de choisir leur itinéraire, leur véhicule et de le préparer (ou pas) pour la course.

    Mais si la Cannonball a lieu aux Etats-Unis, les courses d’OutRun se déroulent en Europe. En effet, après quelques repérages en Floride et à San Francisco, Yu Suzuki trouve les routes bien trop rectilignes et bien trop large pour représenter un challenge intéressant. Ce sera donc sur le Vieux Continent que les équipes trouveront leur inspiration et plus précisément en Suisse, à Monaco, à Rome et à Francfort. Les équipes semblent avoir bien profité de leur voyage en Europe puisqu’il existe, semble-t-il, quelques vidéos sur lesquelles on peut voir différentes “performances” comme un sprint à plus de 190 km/h en BMW3 sur les autoroutes allemandes…

    On retrouve cet esprit dans OutRun. Le jeu se présente d’ailleurs davantage comme une expérience de conduite que comme un jeu de course pur et dur. Ici il est question de plaisir de conduire, de se faufiler dans le trafic, de tracer sa route et de profiter des paysages en choisissant son itinéraire.

    Première à droite puis première à gauche puis première à gauche encore … (Crédits : Sega)

    Chaque stage proposait des décors différents (ruines, campagne, désert … ) et le joueur choisissait quelle route suivre, en se rabattant sur le côté droit ou gauche de la route. Au total, le jeu se compose de 15 pistes et de 5 arrivées différentes. D’ailleurs, OutRun proposait aussi 5 fins différentes (dont certaines assez peu #MeToo compatibles), en fonction du dernier tracé parcouru, une rareté à l’époque.

    Le souci du détail va jusqu’à l’effet de Lens Flare. (Crédits : Wired.co.uk)

    Pour que le joueur se sente vraiment dans un baquet de Ferrari, OutRun pousse le vice jusqu’à le laisser choisir la chanson qui l’accompagnera durant son périple via l’autoradio de son bolide. Nous sommes bien loin de Spotify et seules 3 chansons sont prévues : Magical Sound Shower, Passing Breeze, Splash Wave. Composées par Hiroshi Kawaguchi, elles sont encore considérées aujourd’hui comme des oeuvres majeures du chiptune et de la musique de jeu vidéo en général.

    L’héritage

    Bien évidemment, ce succès en Arcade a conduit à une flopée d’adaptation plus ou moins réussies. A l’époque, on a donc pu jouer à OutRun sur Master System, Amstrad CPC, Amiga, Commodore 64, MSX, Atari ST, DOS, PC-Engine, Megadrive… Bien plus tard, via des rééditions, ou des compils, les possesseurs de Saturn, de Dreamcast, de PS2, de Game Boy Advance, de 3DS ou de Switch ont pu eux aussi s’essayer à la Cannonball via OutRun.

    OutRun a eu droit à plusieurs suites, moins innovantes que l’original ; OutRun 3D (1989), Turbo OutRun (1989), OutRunners (1992), OutRun 2 (2003) sur arcade. Sur consoles aussi, on trouve quelques opus : Battle OutRun (1989), OutRun Europa (1991), OutRun 2019 (1993), OutRun 2006 : Coast to Coast (2006), OutRun Online Arcade (2006).

    Beaucoup plus de pixels, mais beaucoup moins de charme dans OutRun 2006. (Crédits : Sega)

    Mais OutRun a surtout inspiré nombre d’autres jeu de courses. A la fin des années 80, Sega et Nintendo étant en guerre ouverte, les consoles de Big N ne pouvait accueillir de version d’OutRun. Dès 1987, la firme de Kyoto a donc sorti “son” OutRun nommé Rad Racer, développé par une gloire des jeux vidéos, Square à qui l’on doit la saga Final Fantasy, entre beaucoup, beaucoup, d’autres.. On y conduit aussi une Ferrari rouge (une 328 Twin Turbo) ou une F1 et on peut aussi changer la piste sonore en pleine course.

    Il y a tout de même quelquechose de commun… (Crédits : Nintendo)

    Rad racer a sans doute été le premier de la longue liste de de successeurs. S’il n’y avait pas eu OutRun, il n’y aurait sans doute pas eu Chase H.Q., Road Blasters, Lamborghini American Challenge, Lotus Esprit Turbo Challenge, Crazy Cars… Jeux qui ont eux-même ouvert la voie aux jeux plus récents comme Need For Speed, Driver … et qui sait, peut-être, GTA pour son côté subversif.

    La rédaction
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