Six ans de souffrance, quatre opérations, une diplopie redoutée, une rupture spectaculaire avec Honda et un doute existentiel sur sa carrière… Marc Marquez vient d’écrire l’un des plus grands retours du sport moderne. Sacré champion du monde MotoGP 2025 à 32 ans au volant de la Ducati officielle, le « roi phénix » s’offre un neuvième sacre, entre records effacés et émotions brutes. Retour sur un des come-back les plus fous de l’histoire du MotoGP.
Marc Marquez, né le 17 février 1993 à Cervera, est l’un des pilotes les plus titrés et les plus marquants de l’histoire du sport moto. Après avoir remporté le championnat du monde MotoGP 2025, il entre un peu plus dans la légende, non seulement pour son palmarès mais aussi pour la trajectoire inédite d’une carrière marquée par la précocité, la domination, les blessures graves et un retour au sommet d’une intensité rare.
Son entrée dans la compétition est précoce : dès ses quinze ans, Marquez monte sur le podium du championnat mondial 125cc, lors de sa sixième course dans la catégorie. Il se fait remarquer pour son style de pilotage incisif, agressif, et la façon dont il sauve ses chutes avec une maîtrise spectaculaire. Cette capacité à repousser les limites devient sa marque de fabrique, déjà visible en 2011 lors de sa victoire en Moto2 au Japon, remportée depuis la 29e place sur la grille. Rapidement, Marquez s’impose comme un prodige : champion du monde 125cc en 2010 sur Derbi, vice-champion en Moto2 l’année suivante malgré un accident en Malaisie qui lui vaut un premier épisode de diplopie, puis champion Moto2 en 2012 sur Suter, avec une régularité hors du commun : il gagne 56% des courses disputées dans les deux petites catégories, accumule deux titres et, à quinze ans, entre dans le cercle des plus jeunes vainqueurs.
Son ascension vers la catégorie reine se fait alors en 2013 chez Honda, profitant d’une modification de règlement qui lui permet d’intégrer l’équipe officielle alors même qu’il n’a jamais couru en MotoGP. Dès son deuxième Grand Prix, Marquez s’impose. À la fin de la saison, il est sacré champion du monde à 20 ans et 266 jours, devenant le plus jeune pilote titré dans l’élite, performance inédite depuis Kenny Roberts en 1978. L’année suivante, il remporte dix victoires consécutives en début de saison et achève la campagne avec 13 succès, record toujours inégalé à ce niveau. Son pilotage acrobatique, axé sur les prises de risques, conjugué à une capacité stratégique, impose Marc Marquez comme la figure centrale du MotoGP.
2013 – 2019 : l’ère Marc Marquez
L’ère Marquez est sans partage : il accumule sept titres MotoGP de 2013 à 2019, dont celui de 2019 acquis au terme d’une saison où il bat tous les records : plus grand nombre de points (420), nombre de podiums et de victoires. En tête de l’élite, il se mesure à Jorge Lorenzo (son aîné de 6 ans), Dani Pedrosa (8 ans), et Valentino Rossi (14 ans son aîné), qu’il affronte dans des conflits marquants. Au fil de 284 Grands Prix, dont 206 en MotoGP, il remportera 99 victoires (73 en MotoGP), montant 165 fois sur le podium (126 en catégorie reine), réalisant 102 pole positions et 83 meilleurs tours en course. Il s’offre aussi 15 victoires dans les nouveaux sprints MotoGP inaugurés récemment, pour un total de 4596 points dans sa carrière (3550 en MotoGP).
Mais le 19 juillet 2020, lors du GP de Jerez, la trajectoire s’interrompt brutalement. Marquez chute, se fracture l’humérus droit, opéré dès le lendemain : il tente un retour six jours après, lors du GP suivant, mais aggrave la blessure. Au total, il subira quatre opérations (dont celle consistant à remplacer un fragment d’os par une greffe), restera près de deux ans et demi en convalescence partielle, pilotant sporadiquement sans retrouver sa pleine forme. Entre-temps, la diplopie, déjà rencontrée en 2011, réapparaît en 2022. Marc Marquez jongle entre réhabilitation, petites victoires, chutes douloureuses et perte de confiance. Son équipe Honda, alors pionnière, prend du retard sur Ducati, qui développe la Desmosedici GP au point de dominer le paddock.
1 043 jours au fond du gouffre
Marquez, brûlant d’envie de retrouver son niveau, multiplie les pressions sur les ingénieurs de Honda pour retrouver compétitivité : en vain. Après une cascade de chutes en 2023 et un contrat historique rompu avant terme, il quitte Honda dans la tristesse et rejoint Gresini Racing fin 2023, décidant de courir sans salaire, uniquement soutenu par ses sponsors. Dès la saison suivante, il s’épanouit : plus détendu, plus souriant, il renoue avec la victoire lors du GP d’Aragon après une série noire de 1 043 jours sans succès dans la catégorie reine. Il termine troisième du championnat 2024 derrière Bagnaia et Martín, mais vise déjà le guidon de l’équipe usine Ducati. Déjà là, la performance paraissait impensable.
Puis intégrant le team Ducati officielle en novembre 2024, Marquez effectue dès les premiers Grands Prix une démonstration éclatante : plus mûr, il adapte son pilotage à sa nouvelle machine, plus difficile à dompter, compensant le style Honda tactique et les trajectoires tranchées par une approche plus calculatrice et une technique différente. Sa rivalité nouvelle avec Pecco Bagnaia, qui fut jusque-là le visage de Ducati, marque une saison 2025 exceptionnelle, accumulant victoires, poles et podiums à un rythme effréné.
Marc Marquez, roi phénix et homme de records
Le 28 septembre 2025, à Motegi, Marc Marquez obtient la consécration : une deuxième place qui, après 17 Grands Prix et 2184 jours d’attente (soit la plus longue période d’interruption entre deux titres dans l’histoire de la catégorie), lui vaut son neuvième titre mondial, égalant les palmarès de Valentino Rossi, Mike Hailwood et Carlo Ubbiali pour l’ensemble des championnats remportés, tout en devançant tous ses contemporains sauf Agostini (15 titres) et Nieto (13).
À 32 ans, il devient aussi le cinquième champion le plus âgé, alors qu’il avait été le plus jeune en 2013.
Son retour est jalonné de records : 73 victoires en MotoGP (seul Rossi le devance, avec 89), 74 poles positions en catégorie reine (et 102 toutes catégories), 83 meilleurs tours en course dont 67 en MotoGP, 15 victoires de sprints, 10 doublés sprint-GP la même saison, 541 points sur la saison 2025, record absolu, et 12 victoires sur un même circuit (le Sachsenring).
La chronologie de Marquez, détaillée saison après saison, illustre ce parcours : 13e du championnat 125cc en 2008, 8e en 2009, champion du monde 125cc en 2010. Vice-champion Moto2 en 2011, champion du monde Moto2 en 2012, puis champion MotoGP (Honda) en 2013, 2014, 2016, 2017, 2018, 2019. Non classé en 2020, 7e en 2021, 13e en 2022, 14e en 2023 (Honda puis Gresini), 3e en 2024 (Ducati), et enfin champion du monde 2025 (Ducati).
Ce parcours trouve un écho particulier dans sa relation familiale, lorsqu’il promet à son grand-père, décédé peu auparavant, qu’il s’agit là de sa « dernière chance » de revenir, lui qui avait été encouragé à passer à autre chose après tant de souffrance. Mais Marquez, fidèle à son emblème de la fourmi — signe de ténacité, de travail acharné et de capacité à déplacer des montagnes — entre définitivement dans la légende en devenant lui aussi un phénix du sport moto (Mick Doohan en est autre), capable de renaître après tant de doutes et d’occasions manquées.
En 2025, Marc Marquez cumule 99 victoires, dont 73 en MotoGP, 165 podiums (126 en MotoGP), 102 pole positions (74 en MotoGP), 83 meilleurs tours en course (67 en MotoGP), 15 victoires de sprint, et 4596 points de carrière (3550 en MotoGP). Nonuple champion du monde, Marc Marquez a attendu six ans pour reconquérir sa couronne. Il s’impose aujourd’hui comme l’un des plus grands champions de tous les temps, l’homme des chiffres : 284 Grands Prix, 206 en MotoGP, une domination historique et un retour historique, gravant la saison 2025 dans le marbre des annales sportives.