Le 12 Mai 1984, lors d’un évènement organisée par Mercedes-Benz pour célébrer l’ouverture du nouveau circuit du Nürburgring, le constructeur allemand décide de lancer sa nouvelle Mercedes 190 2.3-16 à travers une course réunissant 21 des plus grands noms de la F1. Sauf que l’arrivée inopinée d’un jeune pilote brésilien encore peu connu, va tout chambouler.

En 1984 Mercedes-Benz présente sa nouvelle Mercedes-Benz 190 E 2.3-16, équipée de modifications mineures pour une course des champions, avec un double objectif : inaugurer le nouveau Nürburgring, une version raccourcie de la célèbre Nordschleife, et lancer la 190 E 2.3-16 soupapes.

Mercedes 190 2.3-16, l’ère des berlines sportives

Le quatre cylindre de la Mercedes 190 E 2.3-16 disposait de quatre soupapes par cylindre, offrant 185 chevaux et un couple de 236 Nm. Cette configuration, peu commune à l’époque, permettait à la voiture d’accélérer de 0 à 100 km/h en 7.8 s et d’atteindre les 230 km/h. Grâce aussi à sa propulsion arrière et à sa conception compacte, elle se présentait comme une berline à l’équilibre optimal entre puissance et sécurité.

Pour prouver la fiabilité de ce modèle face à ses concurrents dans les années 1980, Mercedes a mis à l’épreuve trois unités de pré-production en les faisant courir sur 50 000 km à une vitesse moyenne de 247 km/h au circuit de Nardo en Italie, sans interruption pendant huit jours ! Puis la voiture boucle le tour du Nürburgring en 8 min et 46 s et s’octroie le record de la berline de production à quatre portes le plus rapide du moment.

Mais comme si tout cela ne suffisait pas, en mai 1984, pour marquer la réouverture du Nürburgring après l’accident de Niki Lauda en 1976 et les travaux de rénovation qui ont suivi, Mercedes organise la « Course des Champions ».

Mercedes 190 2.3-16 Race Of Champions

Cette course mettait en vedette la Mercedes Benz 190 E avec des modifications mineures pour la course, incluant l’élimination des silencieux, une suspension abaissée, des freins avant à quatre pistons, un rapport final raccourcis de 4.08, un arceau de sécurité, des freins améliorés, un capot à dégagement rapide, des sièges Recaro avec harnais à six points, et des roues plus larges équipées de pneus de course Pirelli. Vingt et une de ces voitures sont préparées pour les 21 pilotes le plus célèbre de la Formule 1 dans un coloris gris-doré et noir-bleu. Le vainqueur de cette course d’exhibition verra sa voiture exposée au musée Mercedes à Stuttgart.

La Course des Champions rassemble vingt des plus grands noms de la course automobile, dont neuf champions du monde de Formule 1 en vie à l’époque, ainsi que Prost et Senna. Alain Prost, détendu, attend l’arrivée d’Ayrton Senna à l’aéroport de Francfort. Senna, alors un jeune Brésilien relativement inconnu, est invité de dernière minute suite à l’annulation de Nelson Piquet et Emmerson Fittipaldi à participer à cette course aux côtés des légendes de la course automobile. Si le brésilien est champion de Formule 3 et a fait gagner quelques points à son écurie Toleman-hart avec qui il débute en F1, il n’impressionne pour le moment personne.

En plus d’Alain Prost, d’autres noms célèbres ont répondu à l’appel avec entre autres Jack Brabham, Phil Hill, John Surtees, Denny Hulme, James Hunt, Stirling Moss, ou encore, Keke Rosberg, Niki Lauda, et Alan Jones.

Tout le monde est là pour s’amuser sauf Ayrton Senna

Malgré l’ambiance détendue et l’enthousiasme de Senna à partager un moment avec Prost, la compétition prend une tournure sérieuse dès les qualifications, où Prost réalise que Senna n’est pas là pour simplement participer. Si le français est premier sur la grille de départ, il est suivi par Carlos Reutemann et Ayrton Senna est 3ème.

Pour tous les coureurs présents ce jour-là, l’enjeu était inexistant. Il était évident pour chacun que l’issue de cette course de prestige n’aurait aucun impact sur la carrière de quiconque. Des pilotes tels que Lauda, Prost, Rosberg, et Hunt étaient là pour s’amuser et potentiellement endommager quelques voitures aux frais de Mercedes. En somme, aucun des participants n’a pris l’événement au sérieux, à l’exception notable d’Ayrton Senna. Prost révèlera d’ailleurs plus tard qu’après avoir réalisé le meilleur temps devant le Brésilien aux qualifs, ce dernier a cessé de lui parler sur le reste de la journée.

Tout le monde ne voit pas l’avance de Senna d’un si bon oeil

Le Brésilien n’était en effet pas là pour faire de la figuration, mais pour se faire un nom. Après s’être poliment présenté dans les stands et auprès de la communauté de la F1, son intention était claire : gagner la course. Il visait à se distinguer parmi l’élite mondiale du sport automobile, aspirant à inscrire son nom au sommet des classements et à associer son nom à la Mercedes 190 exposée au musée Mercedes de Stuttgart. Afin d’augmenter ses chances, Senna anticipe un peu le départ. Sachant qu’il ne s’agissait pas d’une compétition officielle, aucune réclamation n’est formulée. Le jeune Brésilien s’est rapidement détaché dès le premier virage, et prend une avance significative dés les premières minutes de la course.

Pendant ce temps, les autres pilotes ont l’air d’être moins sérieux et en profitent pour se frôler, se toucher, certains coupant même les chicanes du nouveau circuit. Alain Prost a rencontré un problème technique, le reléguant en fin de peloton, tandis que Jones et De Angelis rencontraient également des soucis. Niki Lauda, en revanche, ne voit pas d’un si bon œil l’avance de Senna et, pourtant parti 14e sur la grille de départ, remonte à la seconde place, déterminé à ne pas laisser ce « jeune » gagner la course ! Mais son effort se révèle insuffisant.

Mercedes sourit jaune

À l’avant, Senna a maintenu sa position de leader contre Lauda et finit la course en tête. Il devance Lauda (double champion à l’époque), Reutmann et Roseberg (champion de 1982). Derrière, les autres pilotes ont continué à offrir du spectacle, en multipliant les dépassements cavaliers, se fichant de ce qu’il se passait aux avants-postes.

Sur le podium, Senna a fièrement célébré sa victoire, s’imposant face à des légendes du sport automobile. Niki Lauda, avec un sourire forcé, a participé à la cérémonie du podium. Cependant, la direction de Mercedes n’était pas très enthousiaste à l’idée d’avoir un vainqueur inconnu qui plus est dont le nom est floqué sur la voiture, espérant attribuer la victoire à un nom plus prestigieux. Évidemment la suite de l’histoire les rendra plus fiers.

Cette victoire a marqué le début de la reconnaissance mondiale de Senna, et c’est dés les semaines suivantes que son talent commence à apparaitre aux yeux du monde, lorsque sous une pluie dantesque à Monaco remonte de la 13 ème à la seconde place, derrière Alain Post, juste avant que le grand prix ne soit arrêté en raison des conditions climatiques.

Bien qu’il n’ait jamais couru pour Mercedes, Senna est devenu l’un des meilleurs pilotes au monde, et la Mercedes 190 2.3 litres 16 soupapes occupe évidemment une place d’honneur dans le musée de la marque.

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